Nous voulons tester un cadre conceptuel qui permettra de
mieux interpréter les résultats empiriques
de l’écologie des sols et de suggérer
de nouvelles expériences clefs. Ce cadre est basé
sur la prise en compte 1 de l’évolution, au
sens darwinien, des interactions faune du sol–plante,
2 des interactions indirectes dues aux activités
de type ‘’ingénieur des écosystèmes’’,
3 de l’efficacité du recyclage des nutriments
: de la capacité des organismes à recycler
les nutriments à l’intérieur de leur
écosystème. Ce cadre sera testé pour
étudier la relation vers de terre–sol–plante
en développant une approche empirique et théorique.
Les vers de terre ont une influence positive sur les plantes.
Les mécanismes impliqués et leurs causes évolutives
sont mal connus. Un des mécanismes les plus reconnu
fait intervenir l’accélération du recyclage
des nutriments par les vers. De Mazancourt a montré
que les herbivores peuvent augmenter la production primaire
en augmentant l’efficacité du recyclage et
non pas sa rapidité. Leurs modèles suggèrent
aussi que l’évolution peut sélectionner,
chez les plantes, des traits augmentant cette efficacité.
Nous testerons ces résultats pour les vers de terre.
A Des modèles (systèmes d’équations
différentielles) seront construits pour déterminer
dans quelles conditions les vers augmentent la production
primaire par l’intermédiaire du recyclage de
la matière organique et dans quelles conditions des
traits biologiques permettant aux vers d’augmenter
la production primaire ont pu être sélectionnés.
B Pour que la relation plante-vers de terre ait été
façonnée par coévolution il faut que
les vers soit capables de modifier la valeur sélective
de plantes et non pas seulement d’influencer leur
croissance. Des expériences en microcosmes seront
mises en place. Les cycles de vie entiers de plantes annuelles
(4 espèces) isolées seront suivis jusqu’à
la production de graines. L’effet des vers de terre
sur des communautés composées de ces plantes
sera suivi au cours de plusieurs cycles de vie successifs.
C Si la relation plante-vers découle d’une
coévolution, des mécanismes subtils ont dû
être sélectionnés. De tels mécanismes
seront recherchés dans trois directions. (1) Par
une expérience de marquage isotopique, nous mesurerons
les flux d’azote induits par les vers. (2) Les vers
influencent le recyclage des nutriments et les plantes en
manipulant la microflore du sol. Nous porterons notre attention
sur la capacité de cette microflore à nitrifier
et dénitrifier à l’aide de différentes
méthodes de microbiologie (enzymologie, DGGE, incubations).
(3) Les vers de terre modifient l’expression des gènes
des plantes, directement par la production de molécules
reconnues par les plantes comme des hormones, ou indirectement
en modifiant le sol. Nous estimerons ainsi par des méthodes
moléculaires l’expression de gènes du
catabolisme, de la croissance et du métabolisme de
l’azote. Ces analyses seront appliquées aux
plantes de l’expérience (B).